« VOX CLAMANTIS IN DESERTO » ou « La voix de celui qui crie dans le désert »
Extrait de l’Évangile selon saint Jean, ch. I :
Et voici quel fut le témoignage de Jean, quand les Juifs lui envoyèrent de Jérusalem des prêtres et des lévites pour lui demander : « Qui es-tu ? ». Il le reconnut ouvertement, il déclara : « Je ne suis pas le Messie ». Ils lui demandèrent : « Qui es-tu donc ? Es-tu le prophète Elie ? ». Il répondit : « Non ». « Alors, es-tu le grand Prophète ? » Il répondit : « Ce n’est pas moi. ». Alors ils lui dirent : « Qui es-tu ? Il faut que nous donnions une réponse à ceux qui nous ont envoyés. Que dis-tu sur toi-même ? ». Il répondit : « Je suis la voix qui crie à travers le désert : Aplanissez le chemin du Seigneur comme a dit le prophète Isaïe. »
Les mots « clamantis in deserto » sont employés aujourd’hui dans un sens qui n’est pas le sens primitif, et signifient : « prêcher ou parler sans être écouté ».
Cette précision étant apportée, je ne puis m’empêcher de penser que l’Eglise catholique d’aujourd’hui, représentée par son clergé à la tête duquel se trouve le Pape, prêche un peu dans le désert. Il suffit, pour s’en convaincre, de voir la vacuité de certaines églises, notamment dans les campagnes où elles ne réunissent plus que des vieillards. On est bien loin de l’enthousiasme débordant des JMJ avec leurs milliers de jeunes venus de tous les continents, ou du dynamisme performant de quelques paroisses qui bénéficient de la proximité d’un site universitaire avec des étudiants réellement ouverts au message du Christ.
Dans la Collégiale Notre-Dame de Roscudon de Pont-Croix, on célébrait ce dimanche, comme dans toutes les églises du monde, le Christ, Roi de l’Univers. C’est le dernier dimanche du temps ordinaire qui annonce, dans le calendrier liturgique, celui de l’Avent. Une fois de plus, hormis la jeune fille qui se dévoue habituellement à la collecte de la quête, la modeste assemblée n’était composée que de personnes âgées. On ne voit plus guère les enfants qu’aux célébrations qui leur sont spécifiquement consacrées : messes de rentrée, messes des familles, diverses communions. De plus, il faisait dans le chœur un froid de canard que n’a pas manqué de souligner, à la fin de la messe, le célébrant ; compte tenu de son âge vénérable, il craint légitimement les courants d’air. Il s’agit du Père Louis Corvest qui vient de fêter cet automne ses 92 ans et qui a été, à un moment de sa carrière sacerdotale, professeur au séminaire de Pont-Croix. Et dire qu’il n’y a plus eu une seule ordination de prêtre dans le Cap Sizun au cours de ces quarante dernières années alors que le séminaire de Pont-Croix, fermé depuis 1964, formait tous les prêtres de la Cornouaille.
Vox clamantis in deserto…
Je ne puis m’empêcher encore de comparer ce désert français à la vitalité des églises africaines dont certains prêtres viennent à présent au secours de nos paroisses démunies de l’Hexagone ; une sorte d’action missionnaire à l’envers, le Sud assistant le Nord. Je ne puis m’empêcher enfin de penser à ce qu’était la pratique de la religion dans le Sénégal de mon enfance. Les messes du dimanche étaient obligatoires et nous avions un carnet de présence à déposer dans le panier de la quête pour attester de notre participation. Et gare à l’enfant qui, de retour à l’école privée catholique le lundi matin, était dans l’incapacité de justifier de son absence ! La preuve que la coercition, notamment chez les esprits jeunes, peut parfois avoir du bon jusqu’à ce qu’ils soient en mesure de forger leur propre jugement.
Vox clamantis in deserto…
La solution pourrait être dans la possibilité du mariage pour les prêtres qui le désirent. La solution pourrait être aussi dans un rôle majeur dévolu aux femmes dans l’Eglise, avec la possibilité pour elles d’être ordonnées. S’il est admis que la femme est l’avenir de l’homme, l’Eglise catholique présentera sûrement un autre visage le jour où nous aurons une femme représentant Saint-Pierre au Vatican.
Vivement la Réforme !
Pont-Croix, 26 novembre 2012