Un jour comme celui-ci…

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Un jour comme celui-ci…

     Un día como éste… Un jour comme celui-ci…

    C’était le titre d’une chronique que Soad et moi avions l’habitude de suivre, tous les jours, à la télévision cubaine durant notre séjour de presque deux années à La Havane. Ce samedi 17 décembre 2016 me renvoie, jour pour jour, à un autre samedi 17 décembre, celui de 1983, le jour où j’ai soutenu ma thèse de doctorat de 3ème cycle. C’était donc il y a tout juste 33 ans, l’âge supposé du Christ à sa mort.

     Ma thèse de lettres, présentée sous la direction du Professeur Jean-Louis Picoche de l’Université de Lille III, avait pour sujet :  « Eugenio de Ochoa, (1815-1872), traducteur d’auteurs du XIXème siècle français ». Elle a nécessité de ma part deux années de recherches studieuses. Frais émoulu de l’école supérieure des officiers de paix de Nice (ENSOP) et recevant comme première affectation le Commissariat du 1er arrondissement à Paris, j’avais rapidement demandé à prendre le commandement de la brigade de nuit afin de pouvoir consacrer mes journées à mon travail universitaire. J’ai été durant cette période un client assidu de la Bibliothèque nationale qui fonctionnait encore sur le site de la rue de Richelieu, dans le 2ème arrondissement, avant que François Mitterrand ne fasse construire, en 1994, la Bibliothèque nationale de France sise depuis lors dans le 13ème. Je me revois finissant ma tournée de nuit à 6h30 du matin, attraper le métro à la station des Tuileries pour rentrer à mon domicile de Créteil et m’accorder un petit somme jusqu’à 12h30. Je prenais une douche rapide, avalais mon déjeuner et, à 14 heures tapantes, je sortais déjà de la bouche du métro Richelieu-Drouot pour me diriger vers la salle de lecture de la bibliothèque où je travaillais sans répit jusqu’à 19 heures, les samedis y compris. Puis, je revenais chez moi pour trois petites heures car, à 23h30 précises, je devais être fin prêt, en uniforme, devant l’ensemble de ma brigade, pour l’exécution du service. Ce fut réellement un grand investissement qui ne laissait pas beaucoup de place aux loisirs.

     Mais cet investissement a payé. Non seulement il m’a valu une mention « très bien » de la part du jury, mais il a décidé, quelques années plus tard, de la suite de ma carrière policière. C’est sur la base de mes connaissances avérées en espagnol que j’ai été sélectionné en avril 1990 pour accompagner, en qualité d’interprète, une mission de haut niveau qui allait étudier la faisabilité d’une coopération policière entre la France et le Venezuela. En août de la même année, j’ai été muté dans ce pays d’Amérique latine comme membre de la Délégation du Service de Coopération Technique Internationale de Police (SCTIP). Jusqu’à mon admission à la retraite en juin 2008, je ne quitterai plus ce service, occupant successivement des postes en Equateur, en Jamaïque et en Centrafrique, pour ne parler que des pays où j’ai été en mission de longue durée.

     Ma mère venant de mourir, je relis avec un brin d’émotion le texte de la dédicace qui figure sur la deuxième page de ma thèse :

A feue Madame Christine GILABERT qui, au Sénégal, sut me donner dans les années 1968-1970 le goût des lettres hispaniques ;

A ma mère Véronique FELIHO, institutrice d’école primaire, qui voulut toujours que son fils fît de « grandes » études ;

A mon épouse Fabienne et à mon fils Christopher enfin, qui auront véritablement partagé avec moi ces années d’études et de recherches consacrées à Ochoa. 

     Et je repense aux mots de Miguel de Unamuno (1) : « Chacun est le fils de ses œuvres, et celui qui ne fait rien n’est rien. »

                                                            Plaisir, 17 décembre 2016

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(1) Miguel de Unamuno, poète, romancier, dramaturge, critique littéraire et philosophe espagnol, né le 29 septembre 1864 à Bilbao et mort le 31 décembre 1936 à Salamanque.