Solitude terrible
Ecoute mon cœur la chanson du soir
La chanson de chaque soir toujours mélancolique
Quand la mer étale s’en vient lécher la digue
Et que Dunkerque l’angoissée se terre derrière ses croisées.
Le silence, ce grand silence flamand que tu ignorais
Le voilà tout à toi, immense et si froid
Plus pénétrant que vent d’Est sur l’Ouémé
A l’heure où les chauves-souris mènent la sarabande
Se poursuivant amoureusement de fromager en fromager.
Ici, point de géant de savane, rien que le sable,
Le vent soulevant le sable des dunes bosselées,
Le vent poussant le sable vers la mer nordique,
Comme un ennemi que l’on boute au dehors
Sans quartier, sans pitié ; et moi je suis là
Qui songe et crois encore en la beauté de la vie.
Car j’ai vu visage ami, visage largement épanoui
En un vrai sourire qui t’a donné chaud, là.
Avoue ! Ton plaisir je l’ai senti dans ton battement
Rapide tel tam-tam de fête au clair de lune quand,
Sur la place du village, c’est la danse des fiancées.
Et tu gambadais dans ma poitrine devenue trop petite
Te croyant soudain libre d’aimer comme en ton adolescence
Quand tu n’avais pas les soucis d’être un cœur d’homme.
Et puis, il y a cette chambre d’hôtel froide à en mourir…
Et ma poitrine s’oppresse, et ma poitrine t’oppresse,
Tu te figes, et te voilà devenu un cœur gros :
Un cœur gros comme ça !
Dunkerque, août 1977