Présidentielle : les raisons de mon choix

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Présidentielle : les raisons de mon choix

 

     Je commencerai par dire que mon choix n’est pas de coeur, mais bien de raison. Si je n’avais écouté que mon coeur, j’aurais assurément voté pour François Bayrou au premier tour, comme en 2007, alors que j’étais encore en poste à Bangui et que Nicolas Sarkozy était pourtant mon ministre de tutelle, Place Beauvau. J’avais alors perdu mon pari contre Soad et, par raison, j’avais accordé au second tour mon vote à Ségolène Royal… pour perdre à nouveau. On ne pourra donc pas m’accuser de manquer de constance dans mon choix de n’avoir jamais voulu de Nicolas Sarkozy comme président. Le seul repoussoir qui me ferait voter en sa faveur serait celui d’une menace avérée du Front National, comme ce fut le cas avec Jacques Chirac en 2002. C’est pour dire…

     Je n’ai pas voté le 22 avril pour François Bayrou. Non seulement, j’en ai été empêché pour cause de funérailles en province mais, avant tout, j’étais conscient qu’il fallait porter tout l’effort sur le candidat le mieux placé à gauche parce que, plus que jamais, du fait de la crise et de ses dommages collatéraux, la bataille allait être rude. Et ce candidat-là, c’était François Hollande.

     Voilà en effet un bonhomme, décrit par tout un chacun (y compris par les membres de sa propre famille politique) comme un ventre mou, qui se met en réserve du Parti Socialiste après y avoir exercé pendant près de dix années des responsabilités importantes et qui choisit de tracer son propre sillon dans une espèce de traversée du désert. Pour cela, il se recentre sur son fief corrézien avant de commencer à labourer avec patience et tenacité le reste de l’Hexagone, jusque dans les plus petites bourgades. Ces deux vertus le conduiront à remporter les primaires socialistes ; et le voici aujourd’hui au second tour de la présidentielle ! François Hollande a beau se targuer d’être un homme « ordinaire », il faut avoir l’étoffe des « grands » pour mener un tel combat malgré la présence annoncée d’un Dominique Strauss-Khan sur la ligne de départ. On connaît la suite de l’histoire ; bien que favori de tous les sondages, le chef du FMI se carbonisera tout seul avant même de livrer bataille. Mais ceux-là mêmes qui prétendent aujourd’hui que sa défection a servi François Hollande devraient avoir l’honnêteté de reconnaître qu’elle a fait également l’affaire de Nicolas Sarkozy, d’où les soupçons qui pèsent sur ce dernier d’avoir instrumenté le scandale du Sofitel à New-York.

     Avec François Hollande, je choisis donc l’homme. Mais, au-delà de sa personne, je choisis les idées qu’il défend car mon coeur battra résolument à gauche… tant que la gauche, honorant ses valeurs fondamentales, restera le parti de la défense des petits contre les puissants. Depuis bientôt quarante années que je vis en France, je sais bien qu’il y a une gauche « caviar » dont le train de vie s’apparente plus à celui des bourgeois du triangle NAP tant prisé par les riches étrangers (Neuilly-Auteuil-Passy) que de celui des chômeurs de la Grande Borne à Grigny, dans l’Essonne. Je n’ignore pas que bon nombre de dirigeants du PS, pour être passés dans les mêmes moules que leurs opposants de la droite traditionnaliste, ces lieux de pouvoir qui ont pour nom ENA, Sciences Po, HEC, Polytechnique et que sais-je encore, ont parfois les mêmes réflexes corporatistes qui les conduisent à préserver, bec et ongles, les avantages qu’ils ont acquis. Mais, par leur positionnement sur l’échiquier politique, ils demeurent malgré tout les porte-parole des sans-voix et, de deux maux, j’ai choisi de choisir le moindre.

      Il est bien évident qu’au lendemain du 6 mai, s’il est élu, François Hollande ne fera pas disparaître d’un coup de baguette magique les effets de la crise. Je veux néanmoins avoir l’innocence de croire que ces effets seront désormais mieux partagés par tout un chacun et non seulement par les plus démunis. A vouloir continuer de pratiquer une politique qui ne favorise que les riches sous prétexte d’éviter le fameux « nivellement par le bas », on court tout droit à l’implosion sociale. Et, comme durant la Révolution de 1789, les riches d’aujourd’hui risquent de finir au gibet. A quoi sert de vouloir gagner toujours plus sa vie si c’est pour la perdre un jour ? Les pauvres, eux, n’ont plus rien à perdre… souvent même plus la vie.

     Qu’on m’entende bien : je ne parle pas d’EGALITE ; dans mon esprit, l’ouvrier ne sera jamais assimilé au patron. Je parle simplement de JUSTICE. Cette justice passe nécessairement par une meilleure redistribution des biens, surtout lorsque la croissance n’est pas au rendez-vous et que les nécessiteux qui font appel aux Restos du Coeur sont de plus en plus nombreux chaque jour. Et que dire des sans-abri ou des mal logés dans une nation qui se vante pourtant d’être la cinquième puissance économique du monde ?

     Je ne parle plus d’EGALITE, mais je voudrais continuer à croire en la LIBERTE et en la FRATERNITE. La fraternité, c’est une exigence pour le chrétien que je suis et pour qui cette parole du Seigneur garde toute son acuité : « Ce que vous aurez fait au plus petit des miens, c’est à moi que vous l’aurez fait ». La liberté, c’est ma revendication à moi, qui ne suis encarté nulle part et qui me réjouis de pouvoir vivre dans un pays où il est encore possible d’exprimer ses opinions, sans pression d’aucune sorte, comme je le fais aujourd’hui.

     J’en profite pour remercier au passage tous ceux qui me font l’honneur ou l’amitié de me lire régulièrement. Malgré la trêve que je me suis imposé durant le temps de Carême, je constate avec plaisir que mon site aura été consulté, en à peine trois mois, plus de 8.000 fois. Cela m’encourage pour mes écrits futurs. Là encore, tout est affaire de foi, d’espérance… et de charité.

Bon vote, demain !

Plaisir, 5 mai 2012